Suite de l’examen des éléments mis en avant dans Le Point par Jacques Balthazart à l’appui de la théorie de la « différenciation sexuelle » du comportement humain qu’il promeut. Dans cette seconde partie, il sera question de son invocation de l’existence chez l’humain d’une « bonne dizaine de noyaux sexuellement différenciés » visibles uniquement post-mortem sur des coupes histologiques. Ce sujet mérite qu’on s’y penche en détail, car des données soigneusement choisies et présentées de manière fallacieuse concernant certains de ces noyaux sont au cœur du discours de Jacques Balthazart. Continuer la lecture de « Les cerveaux en bleu et rose selon Jacques Balthazart (partie 2) »
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Les cerveaux en bleu et rose selon Jacques Balthazart (partie 1)
Le Point a publié le 17 avril une interview de Jacques Balthazart promouvant son nouveau livre, Quand le cerveau devient masculin[1]. Ce livre remarquable, nous dit-on, « résume » à l’usage du grand public les mécanismes de la différenciation sexuelle du cerveau et du comportement (apparemment connus, donc). En bref, ceux-ci sont masculinisés chez les hommes par l’exposition pré- ou périnatale à la testostérone, affirme l’« éminent spécialiste des hormones sexuelles chez les oiseaux ». Dans cette interview par Thomas Mahler et Peggy Sastre, il « s’explique en longueur sur ces facteurs biologiques qui n’excluent en rien le poids des influences sociales et culturelles ». On suppose donc qu’y sont mis en avant des faits précis et bien établis étayant cette théorie qui traîne depuis 60 ans à l’état d’hypothèse dans la littérature scientifique, et que Balthazart et Sastre défendent vigoureusement dans l’espace public depuis une dizaine d’années. Passons-les donc en revue. Continuer la lecture de « Les cerveaux en bleu et rose selon Jacques Balthazart (partie 1) »
Max Bird et la biologie de l’homosexualité
A l’occasion de la journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie, un humoriste spécialisé dans la vulgarisation ludique a réalisé une vidéo qui fait un tabac en ligne. Intitulée « L’homosexualité expliquée scientifiquement », elle prétend expliquer pourquoi l’homosexualité n’est ni un choix, ni contagieuse, ni héritable génétiquement. Si l’intention est louable, l’argumentaire mobilisé est déplorable. Un désastre qui m’oblige à prendre la plume toutes affaires cessantes. Continuer la lecture de « Max Bird et la biologie de l’homosexualité »
Les pouvoirs extraordinaires de France 2 (partie 1)
Plusieurs millions de personnes ont regardé l’émission Les pouvoirs extraordinaires du corps humain consacrée le 17 mars 2015 aux différences entre hommes et femmes. Transmutation d’hypothèses en certitudes, de points de vue situés en « vérités scientifiques », d’isomorphismes en dimorphismes, de différences au moins en partie socialement construites en différences naturelles, d’un projet de mise en question des stéréotypes en entreprise de validation d’un monceau d’idées reçues, d’un support de vulgarisation scientifique en outil de diffusion de croyances et de normes prescriptives… Les pouvoirs de France 2 sont réellement extraordinaires, et la chaîne publique en use avec une légèreté préoccupante. Continuer la lecture de « Les pouvoirs extraordinaires de France 2 (partie 1) »
Le camion et la poupée : jeux de singes, jeux de vilains
Un argument est régulièrement invoqué à l’appui de l’idée qu’il existe une différence naturelle entre filles et garçons dans les choix de jouets : la même différence aurait été observée chez les singes. La lecture de la littérature scientifique ayant adressé cette question ne nous apprend pas grand chose sur les singes, et encore moins sur les enfants humains. Elle permet en revanche d’éclairer sous un jour intéressant le comportement des personnes qui ont utilisé cet argument, eu égard à la manière souvent fantaisiste – et toujours fallacieuse – dont ils ont résumé cette littérature. Ce nouvel exemple de vulgarisation scientifique alimentant la naturalisation du genre est aussi l’occasion d’explorer la grande diversité de ses chemins, ainsi que celle des modalités de distorsion des résultats d’études scientifiques. Continuer la lecture de « Le camion et la poupée : jeux de singes, jeux de vilains »